Un bon nombre des textes écrits ou compilés par le duc de Zhou décrivent des situations historiques ou peut-être tirées de fables connues à l'époque. Par exemple le trait 5 de l'hexagramme 36 (que l'on note 36.5) décrit la situation du prince Ji qui a dû simuler la folie pour préserver sa vie. Ces situations favorisent l'association d'idées et ainsi peuvent servir de repères dans la vie quotidienne. Ainsi, on agira comme le prince Ji si l'on estime que la situation l'exige.
Il serait plus précis de dire qu'il s'agit d'un livre de philosophies. L'influence du Yi King sur le Taoïsme et le Confucianisme est incontestable. Par exemple la notion de wu wei, le non-agir (terme incorrect car il s'agit d'agir quand c'est nécessaire plutôt que pour le profit) si cher aux taoïstes, peut être retrouvée dans le jugement de l'hexagramme 2 :
Si l'homme noble doit entreprendre quelque chose et veut se mettre en avant, il s'égare; mais s'il suit, il trouve une direction.
(traduction de Richard Wilhelm et Etienne Perrot) Les philosophes confucéens ne sont évidemment pas en reste, Confucius étant considéré comme ayant lui-même rédigé les commentaires sur les images ainsi que le texte des dix ailes qui accompagnent le livre. Toutefois c'est naturellement plus sur les images que les jugements qu'ils s'appuieront. Les thèmes développés peuvent également se rapprocher de la pensée occidentale, comparez par exemple le célèbre aphorisme de Jean Anthelme Brillat-Savarin :
Dis moi ce que tu manges, je te dirai qui tu es.
avec ce jugement de l'hexagramme 27 :
Observe l’administration de la nourriture et ce qu’un homme recherche pour remplir sa propre bouche.
(traduction de Richard Wilhelm et Etienne Perrot)
Si les jugements présentent des situations objectives, les images et les commentaires sur les traits ont très souvent un aspect moral. Par exemple l'image de l'hexagramme 39 :
Ainsi l'homme noble se tourne vers sa propre personne et développe son caractère.
(traduction de Richard Wilhelm et Etienne Perrot) Nous sommes invités à ne pas rejeter la faute sur les autres mais à chercher en nous-mêmes ce qu'il faut améliorer.
Les conseils politiques que l'on trouve dans le Yi King viennent encore une fois principalement des images et des commentaires sur les traits. Par exemple, avec le commentaire de 19.3, on nous indique qu'une fois arrivé au pouvoir on doit redoubler de vigilance et ne pas prendre ses aises :
Approche commode. Rien qui ne soit avantageux. Si l'on est amené à se désoler à ce sujet, on devient exempt de blâme.
(traduction de Richard Wilhelm et Etienne Perrot)
Une des spécificités du Yi King, est son utilisation comme oracle. Les textes sont ainsi parsemés de formules mantiques telles que :
Grande fortune. Rien qui ne soit avantageux.
(traduction de Richard Wilhelm et Etienne Perrot) Ces formules, reliquats d'une époque où l'on cherchait des signes favorables avant de commencer une entreprise, sont contestables, y compris dans leur version renouvelée par Cyrille Javary et Pierre Faure qui consiste à renommer Fortune en Ouverture et Infortune en Fermeture. On peut les ignorer, au moins dans un premier temps, non parce qu'elles seraient dénuées de sens, mais parce qu'elles s'opposent aux idées contenues dans les traits 16.1 (se garder d'un enthousiasme excessif) et 58.5 (parler d'infortune peut entraîner le découragement). L'enjeu ici est la cohérence, mais au final c'est votre choix d'en tenir compte ou pas.
Ces commentaires étant des oracles, il est naturel de dire que le Yi King est un livre de divination. Effectivement, c'est l'aspect originel du livre, et il est considéré comme tel par le plus grand nombre. Ne pas le mentionner de prime abord aura permis de présenter ses autres facettes moins connues. Les oracles du Yi King sont obtenus traditionnellement avec l'aide de tiges d'achillée ou de pièces de monnaie. Plus récente, la méthode informatique donne également des résultats acceptables.
John Cage était un compositeur avant-gardiste qui a créé plusieurs oeuvres avec le Yi-King, la première étant Music of Changes en 1951.
Merce Cunningham était un danseur et chorégraphe américain qui a utilisé le Yi-King pour déterminer l'organisation de ses chorégraphies. Dans cette interview en anglais, il explique comment il a découvert le Yi King.
Philip K. Dick est un des auteurs de science-fiction les plus imaginatifs. Il a utilisé le Yi King pour son livre, "Le Maître du Haut-Château". Malgré sa réussite, il a eu des sentiments mitigés à propos de son expérience avec le Yi-King, il en parle ici (en anglais).
Depuis le deuxième siècle avant J.C., les fonctionnaires et les militaires chinois devaient connaître cinq livres appelés classiques (Jing) :
Vous trouverez plus d'informations sur les classiques chinois sur le site de la Bibliothèque de France et sur celui du Collège de France dans la section dirigée par Anne Cheng et intitulée Histoire intellectuelle de la Chine.